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Les pesticides

Qu’est ce qu’un pesticide ?

Les pesticides, produits phytosanitaires et biocides sont des termes souvent utilisés les uns pour les autres et le médecin du travail n’appartenant pas à la MSA (Mutualité sociale agricole) ne sait ou chercher une documentation simple mais à jour et il me paraît indispensable d’utiliser le bon vocabulaire.

  • Par pesticide, on entend une substance utilisée pour lutter contre les organismes nuisibles, c’est un terme générique qui rassemble les insecticides, fongicides, herbicides et parasiticides.
  • Par produit phytosanitaire, on entend un produit utilisé pour soigner les organismes végétaux en les protégeant des organismes nuisibles ou en prévenant leur action, mais aussi en tuant ou en repoussant les plantes concurrentes, les parasites ou les ravageurs et organismes nuisibles.
  • Par agent biocide, on entend une large variété de produits incluant les désinfectants ménagers, les insecticides, les produits de traitement des bois, des eaux et les peintures marines antisalissures… ; il est destiné à détruire, repousser ou rendre inefficace les organismes nuisibles. Le biocide est donc par définition un produit actif pouvant avoir des effets nuisibles pour l’homme.

Comme on le voit, il est préférable d’utiliser le terme de PESTICIDES « tuer animal » en incluant comme dans la réglementation européenne (directive 91/414/CEE, réexaminée régulièrement par chaque état membre lors d’une demande d’AMM (autorisation de mise sur le marché), soit à la suite d’un programme de réévaluation de leur toxicité et de leur écotoxicologie, soit pour la mise à jour de la liste des substances actives autorisées ou interdites par l’Union européenne) les régulateurs de croissance, les substances qui répondent à des problèmes d’hygiène ou de santé publique (cafards dans habitat, poux, puces) ou de santé vétérinaire (vecteurs de maladies c/e le paludisme, les bactéries pathogènes de l’eau ..) les surfaces non agricoles (routes, aéroports, voies ferrées, réseaux électriques …)

On réservera le terme de biocides à des pesticides à usage non agricole.

Quelques informations générales sur les pesticides

Historique

La lutte contre les prédateurs existe depuis des millénaires. L’usage du soufre remonte à la Grèce antique et l’arsenic est déjà recommandé par PLINE en tant qu’insecticide. Des plantes ont été utilisées pour leurs propriétés toxiques (aconit contre les rongeurs) depuis le Moyen Âge. L’arséniate de plomb a été utilisé au XVIème siècle en Chine et en Europe, L’utilisation de la nicotine connue à partir de la fin du XVIIème et en Inde les jardiniers utilisaient des racines contenant de la roténone comme insecticide. La chimie végétale s’est développée au XIXème siècle (pesticides minéraux à base de sels de cuivre, fongicides à base de sulfate de cuivre comme la célèbre bouillie bordelaise,…) et au XXème siècle les sels mercuriels ont été utilisés pour traiter les semences.

L’ère des pesticides de synthèse débute après les années 1930 (DDT synthétisé par Zeidler en 1874 est utilisé comme insecticide et commercialisé dès 1943. En 1944, l’herbicide 2,4-D est synthétisé et toujours employé. La recherche des matières actives jusqu’en 1970-80 s’est faite au hasard et on recherchait à améliorer son efficacité à travers la synthèse d’analogues.

Actuellement on met l’accent sur la compréhension des modes d’action et la recherche de cibles nouvelles permettant d’établir des relations structure-activité pour aboutir à l’obtention des matières actives et on assiste à une consolidation du marché au niveau des familles les plus récemment découvertes avec la recherche de nouvelles propriétés.

Quelques généralités sur les pesticides

Le développement d’une agriculture intensive exige d’emblée l’utilisation de pesticides en grande quantité. En France, les 14,3 millions d’hectares de forêts et les 18 millions d’hectares de production végétales diverses consomment l’essentiel des pesticides commercialisés soit environ 100 000 tonnes, le chiffre restant à peu prés stable depuis quelques années voire diminue et cela lié surtout au fait que les matières actives sont plus efficaces que dans les décennies antérieures. La France reste en 2007 le 3ème consommateur mondial de pesticides, presque autant que les Etats-Unis pour une surface agricole 10 fois plus petite et le 1er de l’Union européenne (la France et les Pays-Bas sont les pays qui consomment le plus de pesticides à l’hectare).

A ces 100 000 tonnes utilisées en agriculture (93 % de la production), 3 % de la production est utilisé par les jardiniers amateurs où 115 matières actives sont souvent employées pour la composition de 500 produits « autorisés en jardin amateur », 3 % sont destinés aux collectivités, administrations et à la SNCF. Bien que les quantités (1500 tonnes) soient très inférieures à celles utilisées en agriculture, les lieux d’application des désherbants (trottoirs, allées, fossés, routes gravillonnées,…) font craindre une pollution des eaux plus directe.

La répartition en tonnes de produits formulés se répartit en agriculture par familles de produits dont la plus importante est celle des fongicides suivie des herbicides, les insecticides ne représentant que de 3 à 4 % du volume annuel des pesticides.

Les différentes catégories des pesticides

On parle de :

  • ACARICIDES : contre les acariens
  • ANTI-RUSSETINGS : contre rugosité des pommes
  • BACTERICIDES : contre bactéries
  • CORVICIDES et CORVIFUGES : contre les corbeaux
  • FONGICIDES : pour l’inhibition ou la prévention du développement des champignons
  • HERBICIDES, désherbants, phytocides ou débroussaillants : pour destruction des plantes indésirables (aussi appelées mauvaises herbes ou adventices
  • INSECTICIDES : pour la destruction ou la prévention du développement des insectes
  • MOLLUSCICIDES : contre les limaces et les escargots
  • NEMATICIDES : contre les nématodes
  • PARASITICIDES : contre les parasites
  • REPULSIFS : contre le gibier et les oiseaux
  • RODENTICIDES : contre tous les rongeurs (ragondins, campagnols, rats, souris, surmulots,…)
  • REGULATEURS de croissance : pour la prévention de la croissance excessive d’une plante (lutte contre la verse du blé), les anti-germinants, les produits favorisant la résistance des plantes, le bouturage, la mise en fruits,…
  • TAUPICIDES : contre les taupes
  • VIRUCIDES : contre les virus

Le terme de pesticide ou de produit phytosanitaire exclut les substances nutritives de type engrais ou oligoéléments sauf s’il s’agit de mélange d’engrais et de pesticides.

Quelle est la composition des pesticides ?

  • Une ou plusieurs matières actives qui confère au produit l’effet poison désiré et qui est responsable en tout ou en partie de l’effet toxique (par exemple le GLYPHOSATE que l’on trouve dans de nombreux désherbants totaux, seul ou associé à d’autre désherbant, le METALDEHYDE que l’on trouve dans la plupart des anti-limaces, l’ISOPROTURON dans les désherbants des céréales).
  • Un diluant qui est une matière solide ou un liquide (solvant) incorporé à une préparation et destiné a en abaisser la concentration de la matière active. Ce sont le plus souvent des huiles végétales dans le cas des liquides, de l’argile ou du talc dans le cas des solides, dans ce dernier cas, le diluant est appelé charge.
  • Des adjuvants ou additifs, substances dépourvues d’action biologique mais pouvant modifier les qualités du pesticide et d’en faciliter son utilisation. Ils peuvent faire fonction d’adhésif, agent anti-moussant, anti-gel, liant, tampon, agent porteur, déodorant, agent dispersant, teinture, émétique, émulsifiant, fertilisant, conservateur, agent odorant, parfum, agent d’appétence, répulsif, phytoprotecteur, solvant, stabilisant, synergiste, épaississant, mouillant, divers,…

Il existe de part le monde 900 matières actives différentes commercialisées dans 100 000 spécialités autorisées à la vente. En France on compte environ 520 matières actives homologuées entrant dans la composition de 2588 spécialités commerciales. Actuellement la procédure d’homologation permettant l’autorisation de mise sur le marché exige que la firme demandeuse réalise un nombre d’expérimentations prévu par la réglementation (efficacité, sélectivité et innocuité vis-à-vis de la culture concernée, toxicité aiguë et chronique, effets spécifiques sur la santé à long terme et des études sur l’écotoxicité de la matière active comme les conditions de dégradation de la substance, évaluation du ou des risques vis-à-vis de l’environnement).

Devant les dangers des pesticides, l’AMM est de plus en plus longue à obtenir, actuellement il faut 8 à 10 ans de recherche et un investissement d’environ 140 millions d’euros.

Les dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à la classification, l’emballage et l’étiquetage des substances dangereuses sont régies par la directive européenne 67/548/CEE. Lorsqu’une AMM est attribuée, qu’elle soit provisoire ou pour 10 ans, celle-ci est assortie de 2 catégories d’informations obligatoirement présentes sur l’étiquetage :

  • Une information relative à l’efficacité du produit (conditions d’emploi).
  • Une information relative à la toxicité et à l’écotoxicité du produit (symboles des risques, phrases de risques et conseils de prudence.

La directive européenne 91/414/CEE prévoit aussi l’évaluation des anciennes substances actives ; ainsi à son entrée en vigueur en 1993, plus de 800 substances actives étaient recensées, auxquelles il faut ajouter la centaine de molécules mises sur la marché depuis cette date. Ainsi en 2003, plus de 400 substances actives ont été ou devaient être éliminées.

Les substances actives de pesticides autorisées ou interdites par l’Union européenne sont définies à la suite d’un programme de réévaluation de leur toxicité et de leur écotoxicité. Les substances actives font alors l’objet d’une décision d’inscription ou de non-inscription à l’annexe I de la directive 91/414/CEE leur permettant ou non d’entrer dans la composition des produits phytosanitaires sur tout le territoire de l’UE. (Voir en savoir plus… à la fin de l’article).

Quelle est la toxicité pour l’être humain ?

A grand renfort de pesticides, l’agriculture connaît des rendements impressionnants. En revanche la moisson des connaissances sur les effets toxiques des produits phytosanitaires demeure malgré l’abondance des publications mondiales encore insuffisante. On distingue les intoxications aiguës et les intoxications chroniques.

Les intoxications aiguës

Le délai qui sépare l’exposition et l’apparition des troubles va de quelques heures à quelques jours permettant le plus souvent de relier les effets à la cause. Sans vouloir rattacher les troubles présentés et les familles de pesticides on peut les mettre en cause devant une symptomatologie cutanéomuqueuse (54 % des dossiers centralisés à l’institut national de médecine agricole (INMA de Toulouse), des troubles digestifs (34 % des dossiers), des troubles de l’état général comme des céphalées, vertiges (24 % des dossiers et des troubles respiratoires (20 % des dossiers). A noter que la moyenne des dossiers étudiés est de 300 par an.

Ces troubles aigus obligent 2/3 victimes à consulter un médecin, parmi lesquelles 73 ont été hospitalisées et 150 ont dû arrêter leur travail, ce qui témoigne de l’importance des intoxications. A noter surtout que 60 % des utilisateurs ne bénéficiaient d’aucune protection adaptée lors de l’emploi de ces produits.

A côté de ces intoxications aiguës liées au travail, les pesticides peuvent être utilisés dans un but suicidaire (absorption massive de rodenticides à base d’anticoagulants responsable de mort en 5-7 jours (hémorragies graves).

Les intoxications chroniques

Les atteintes chroniques dues aux pesticides sont dénoncées par de nombreux scientifiques, mais on constate que les études de risque prévues pour les tester sont insuffisantes pour nous protéger de ces dangers.

Ainsi la directive européenne 91/414/CEE qui gère les évaluations des matières actives des pesticides et leur AMM comporte de nombreuses lacunes et les tests qu’elle prévoit sont insuffisants.

  • Il n’y a pas de tests spécifiques pour la mise en évidence d’effets de perturbations du SYSTEME ENDOCRINIEN et les tests d’immunotoxicité des pesticides ne sont pas systématiquement requis.
  • L’évaluation des pesticides ne tient pas compte de leurs effets sur les organismes les plus sensibles comme les enfants pour lesquels l’application d’un facteur de protection supplémentaire serait nécessaire
  • Elle ne prend pas en compte les effets de synergie (effets combinés de substances mélangées) des combinaisons de pesticides ou ceux des composants dit « inertes » dans les formulations commerciales, et pourtant plusieurs études prouvent le contraire. Une étude de 1996 a mis en évidence des effets de synergie entre des pesticides aux potentiels oestrogéniques faibles, or les effets des mélanges de ces pesticides étaient de 150 à 1600 fois plus importants que les effets des pesticides pris isolement. Une autre étude de 2004 du Pr G.E SERALINI a montré que le potentiel du ROUND UP est supérieur à celui de sa matière active, le GLYPHOSATE à cause de la présence de co-formulants conçus pour renforcer son action.
  • Les spécialités commerciales sont évaluées au niveau national, évaluation qui comporte de nombreuses lacunes probablement liées au manque de personnel pour gérer la masse de dossiers d’AMM (voir l’affaire de REGENT TS mis en cause dans la disparition importante de colonies d’abeilles dans les années 1990).

Parmi les intoxications chroniques on distingue les atteintes dermatologiques et les atteintes neurologiques

Les atteintes dermatologiques

Rougeurs, démangeaisons avec possibilité d’ulcération ou de fissuration, urticaire sont des troubles dermatologiques fréquemment décrits en touchant plutôt les parties découvertes du corps (bras, visage). Beaucoup de pesticides sont responsables de troubles cutanés dont les ROTENONES responsables de lésions sévères au niveau des régions génitales.

Les atteintes neurologiques

Les organochlorés font apparaître une fragilité musculaire, une baisse de la sensibilité tactile. Les organophosphorés entraînent à long terme des céphalées, de l’anxiété, de la dépression et de l’insomnie associés parfois à des hallucinations. Certains auteurs évoquent une paralysie avec les dérivés mercuriels ou arsenicaux. Un groupe international de scientifiques et de médecin et THEO COLBORN en 1995 ont déclaré que les substances chimiques perturbatrices du système endocrinien peuvent perturber le développement neurologique et comportemental et par conséquent le potentiel des individus exposés in utero… Cette perte de potentiel peut prendre la forme d’anomalies comportementales ou physiques. Elle peut se manifester par une capacité intellectuelle réduite, une moindre adaptabilité sociale, une réactivité aux stimuli de l’environnement amoindrie.

Le docteur Guillette a observé des populations d’enfants exposés à des pesticides. Elle a noté chez eux une moins bonne coordination motrice, une mémoire à 30 minutes moins bonne et de moins bonnes aptitude dans l’épreuve de dessin d’une personne. Elle a aussi observé des comportements agressifs plus fréquents chez ces enfants exposés aux pesticides.
En France, une étude suggère des effets négatifs sur les fonctions cognitives des adultes soumis à une exposition chronique à des pesticides utilisés en viticulture (« neuropsychologic effets of long term exposure to pesticides : results from the french phytoner study » BALDI et al : env.health, perspectives. Vol 109 (8) august 2001, pp 839-844)

D’autres études montrent que les effets neurocognitifs des pesticides organophosphorés sur populations exposées professionnellement sont à troubles de mémoire, anxiété, irritabilité et dépression.

L’exposition à des pesticides semble aussi liée à un risque plus grand de développer les maladies de Parkinson et d’Alzheimer. Une étude française (BLADI et al ; 2003) montre que chez les agriculteurs hommes utilisant des pesticides, le risque de développer la maladie de Parkinson était multiplié par 5 ou 6 et celui de développer la maladie d’Alzheimer multiplié par 2 à 4 fois par rapport à des sujets non exposés.

Les atteintes du système cardiovasculaire

Les organochlorés développent des palpitations et des perturbations du rythme cardiaque.

Les troubles du système hématopoïétiques

Les organochlorés peuvent provoquer une baisse du taux des globules rouges et blancs avec risque de leucémie non écarté.

Les atteintes du système respiratoire

Ces atteintes sont souvent en relation avec les phénomènes d’irritation engendrés par un grand nombre de pesticides, favorisant ainsi les surinfections (bronchites, rhinites et pharyngites).

Les atteintes des fonctions sexuelles

La fertilité masculine dans les pays développés n’a cessé de décroître depuis 50 ans, comme le prouvent de nombreuses études. Les concentrations du sperme en spermatozoïdes diminuent depuis 60 ans environ.

De nombreuses études montrent la relation entre le fait d’être exposé aux pesticides et une baisse de la fertilité masculine (Carlsen E. et al 1992).

Des scientifiques de l’INSERM de Rennes et du Kremlin Bicêtre ,ainsi que d’autres (Hôpital de Rosario, en Argentine) ont étudiés une population de 225 Argentins issus de régions agricoles des régions où les pesticides étaient très utilisés et qui avaient consulté entre 1995 et 1998 pour un problème d’infertilité. Les scientifiques ont cherché s’il existait une relation entre l’exposition à certains agents environnementaux et ces situations d’infertilité. Ils montrent que l’exposition aux pesticides et à certains solvants est associée à des concentrations en spermatozoïdes bien au-dessous de la limite de fertilité (Dr Luc Multigner, Dr Alejandro Oliva, in « Human Reproduction », publication de la société Européenne de reproduction humaine et d’embryologie, vol 16, p 768 ; aout 2001).

Chez les femmes, l’exposition aux pesticides est un facteur de risque d’infertilité important. Une étude publiée en 2003 a mis en évidence dans une population ayant des problèmes d’infertilité, que le facteur de risque le plus important était la préparation et l’utilisation de pesticides et particulièrement d’herbicides, ce risque étant multiplié dans ce cas par 27 !!  (Ane R Greenlee, Tye E Arbuckle, Po-HOANG Chyou, « Risk factors for female infertility in an agricultural region », Epidemiology 14:429-434, 2003)

Les risques fœtaux

Les pesticides franchissent la barrière placentaire et ont une action tératogène sur l’embryon. C’est le cas du DDT, du malathion, des phtalimides (fongicide proche de la thalidomide). Il peut aussi survenir des accouchements prématurés et des avortements. Le médecin du travail devra interdire la manipulation de pesticides entre le 23ème et le 40ème jour de la grossesse.

Il faut savoir que le fœtus en développement et le bébé sont extrêmement sensibles aux effets des pesticides. L’exposition du fœtus à des pesticides à certaines périodes de la grossesse peut conduire à un avortement spontané, à des retards de croissance, à des handicaps à la naissance.

L’exposition du fœtus à des perturbateurs endocriniens (pesticides), est même soupçonnée de modifier le sexe de l’enfant à naître. Les chercheurs se sont aperçus que la proportion de bébés mâles par rapport à l’ensemble des nouveau-nés étaient en train de décliner lentement depuis 20 ans dans de nombreux pays industrialisés ou en voie d’industrialisation (Devra Lee Davis et al : Reduced ratio of male to female births in several industrial countries, Journal of the american medical association, Vol 279, n°13 pp 1018-1023, avril 1998). Ces mêmes équipes de scientifiques pensent que ce changement est dû par l’exposition au fœtus à toute une série de produits chimiques perturbateurs endocriniens tels que certains pesticides. Entre la 6ème et la 9ème semaine de grossesse, l’embryon mâle poursuit sa différenciation sexuelle sous l’influence des hormones secrétées par les gonades (glande génitale mâle). Si une substance étrangère à l’embryon vient perturber ce processus hormonal à ce stade, la transformation peut être arrêtée et un bébé femelle peut naître.

Ces mêmes chercheurs ont révélé d’autres problèmes comme des malformations du pénis et des testicules à la naissance, hausse de la fréquence du cancer des testicules, le déclin de la quantité et de la qualité du sperme.

De nombreuses études épidémiologiques montrent que l’exposition professionnelle ou par l’environnement des familles aux pesticides peut amener des retards de croissance, des anomalies congénitales et même des fausses couches.

Une étude menée au Canada par SANTE Canada a montré que le risque de fausse couche et de prématurité était plus grand dans les familles où le père avait manipulé certains pesticides. Le risque de fausse couche était 1,9 fois supérieur si le père avait manipulé des thiocarbamates du CARBARYL ou d’autres pesticides non cités. Le risque d’accouchement prématuré était de 1,7 à 2,4 fois plus élevé si le père avait manipulé la fameuse molécule du ROUND-UP, l’ATRAZINE ou des organophosphorés (An exploratory analysis of the effect of pesticides exposure on the risk of spontaneous abortion in an Otario farm population, Tye Arbuckle et al., Env health, Perspective, vol 109, n°8, august 2001).

Une autre étude en Californie montre que la mort du fœtus due à une anomalie congénitale est plus fréquente chez les mères qui vivent pendant leur grossesse dans une aire de 9 miles carrés autour d’un endroit où l’on a pulvérisé des pesticides. La mort du fœtus due à une anomalie congénitale est encore plus fréquente si l’exposition de la mère aux pulvérisations de pesticides a eu lieu entre la 3ème et la 7ème semaine de grossesse (M. Bell, I. Hertz-Piccioto and JJ Beaumont, A case control study of pesticides and fetal death due to congenital anomalies. Epidemiology ; 2001 ; 12 : pp 148-156).

De nombreuses autres études révèlent que les cas de spina bifida ou d’hydrocéphalie chez les fœtus dont les mères résident à moins d’1/4 de mile d’un champ agricole ont augmenté de 50 %.

Les cancers

Certains types de cancers augmentent particulièrement chez les sujets exposés, manipulant ou fabriquant les pesticides. C’est le cas du lymphome non-hodgkinien (LNH), du cancer du cerveau ou de la vessie.

La fondation américaine contre le lymphome vient de faire paraître un fascicule listant toutes les études épidémiologiques disponibles sur la relation entre le lymphome (cancer des lymphocytes) et pesticides. Sur les 99, 75 montrent une relation positive entre l’exposition à des pesticides et l’atteinte par un lymphome (Susan Osburn, Reasearch report. Do pesticides cause lymphomas? 2000. Lymphoma foundation of america).

Depuis un vingtaine d’années, plusieurs dizaines d’études épidémiologiques montrent que les utilisateurs de pesticides sont plus souvent atteints par certains cancers (estomac, prostate, vessie, cerveau, lèvres, LNH, leucémies,…) que la population générale, les enfants d’utilisateurs et notamment d’agriculteurs sont aussi touchés (Pluygers et al – Pesticides et cancer humain, Revue Ed Aves, Liège, 43 p 2000).

Des études épidémiologiques existent et démontrent aussi que l’exposition environnementale aux pesticides tend a augmenter le risque de développer certains cancers. Les dérivés de l’acide CHLOROPHENOXYACETIQUE ont été associés avec un risque accru de LNH parmi les résidents des zones de culture du riz en Italie du Nord. Une étude écologique conduite aux USA dans une région fortement contaminée par des herbicides organochlorés et triazines montre une hausse significative du risque de cancer du sein (Keetle M.A et al 1997 – Triazine herbicide, Exposure and breast cancer incidence. An ecologic study of Kentucky countries).

Un surcroît de cancers de la thyroïde a été observé dans une population exposée à des mélanges de pesticides organochlorés contenant de fort taux d’HEXACHLOROBENZENE.

Il semble que les enfants soient encore plus sensibles à ce risque que les adultes car ils sont plus exposés en proportion aux cancérogènes et ils sont aussi physiologiquement plus sensibles aux pesticides. Les cancers de l’enfant plus souvent associés à une exposition aux pesticides sont surtout des leucémies, les tumeurs du cerveau, les sarcomes, les lymphomes et les tumeurs de Wilms (tumeur rénale). A ce jour en Europe, 92 substances actives des pesticides sont classées « cancérogènes possibles ou probables soit par l’UE ou par l’Agence de protection de l’environnement des Etats-Unis », Dangerosité des matières actives et des spécialités commerciales phytosanitaires autorisées dans l’Union européenne et en France. IEW /MDRGF – 5 mai 2004.

Les troubles du système immunitaire

Les effets destructeurs des pesticides sur le système immunitaire sont encore surtout étudiés sur des animaux de laboratoire ou sur des cultures. Un rapport scientifique a récemment analysé et résumé les résultats de plus de 100 études expérimentales sur les conséquences de diverses familles de pesticides sur le système immunitaire. La majorité de ces études ont mis en évidence des effets immunosuppresseurs des pesticides étudiés.

Par contre peu d’études épidémiologiques, seule une étude dans le grand nord canadien, a mis en évidence que les bébés nourris au sein avaient accumulé des quantités d’organochlorés dans leur organisme dont du DDE et de la DIELDRINE. Ces enfants développaient 10 à 15 fois plus d’otites que les enfants du sud du Québec, montrant ainsi que certains pesticides pouvaient avoir un effet négatif sur le système immunitaire.

Les perturbations endocriniennes

Les pesticides se comportent comme des « leurres hormonaux ».

Dans le cas d’une perturbation endocrinienne une substance chimique (pesticide) peut troubler ce mécanisme. Une telle substance appelée perturbateur endocrinien peut interférer de plusieurs façons :

  1. imiter la bonne hormone en s’insérant parfaitement dans le récepteur hormonal (les œstrogènes synthétiques c/e le DDT agissent de cette manière, comme un imitateur hormonal)
  2. bloquer l’hormone naturelle en occupant elle-même tous les récepteurs. Aucun message ne parvient alors aux cellules (la VINCLOZOLINE et les PYRETHRINOIDES sont des pesticides qui font partie de cette catégorie en agissant comme des inhibiteurs hormonaux)

Les pesticides perturbateurs endocriniens peuvent agir différemment selon l’âge ou la phase de développement de l’organisme touché. L’exposition in utéro est de loin la plus critique. Le signal hormonal manquant à un stade précis du développement peut perturber la pesticides perturbateurs endocriniens in utéro peuvent être ressentis à un moment ou à un autre, de la naissance à l’âge adulte.

Des expositions régulières même à faible dose sur de très longues périodes à des pesticides perturbateurs endocriniens peuvent causer des dommages important.

Les conséquences de l’exposition à ces pesticides peuvent être variées :

  1. Anomalies congénitales
  2. Déficits immunitaires
  3. Problèmes de reproduction
  4. Développement de certains cancers
  5. Problèmes neurologiques, cognitifs et comportementaux

De nombreux pesticides sont soupçonnés d’être des perturbateurs endocriniens.

A ce jour 48 substances actives autorisées en Europe sont soupçonnées d’être des perturbateurs endocriniens dont le ROUND-UP (Dangerosité des matières actives et des spécialités commerciales phytosanitaires autorisées dans l’Union européenne et en France. IEW/MDRGF. 5 mai 2004).

Comme nous le voyons, les troubles à long terme expliquent qu’en France et dans l’Union européenne, de nombreux pesticides jusqu’alors autorisés (donc considérés comme efficaces et présentant un risque acceptable) ont été interdits à la mise sur le marché et à l’utilisation. Ces produits sont appelés « Produits phytosanitaires non utilisables » (PPNU) Citons pour mémoire le cas de l’ATRAZINE utilisé massivement en France et dans le monde entier c/e herbicide depuis 1962. Sa biodégrabilité et son peu de toxicité lors de sa mise sur le marché en a fait l’herbicide quasi unique pour le désherbage du maïs. Malheureusement du fait de certaines conditions climatiques non évaluées (rayons UV par exemple) l’ATRAZINE est encore le polluant le plus retrouvé dans les eaux (ainsi que toute la famille des TRIAZINES). De plus de nombreuses études expérimentales ont montré qu’elle est TERATOGENE et un PERTURBATEUR endocrinien, on pourrait aussi évoquer le GAUCHO (destructeur d’abeilles), l’ARSENITE de soude, le DDT, etc.

Il est donc indispensable d’effectuer des recherches scientifiques sur les nouvelles molécules mais aussi sur les molécules beaucoup plus anciennes qui étaient connues pour leur innocuité. Les réseaux de toxicovigilance ainsi que les différentes autorités compétentes nationales, européennes doivent être toujours en alerte !

Actuellement, il existe une liste de substances actives de produits phytosanitaires autorisées et une autre interdite par l’Union européenne. Ces deux listes sont régulièrement révisées, la dernière concerne la liste positive (directive 2008/69/CE du 1e juillet 2008) en vue d’y inscrire les substances actives suivantes : clofentézine, dicamba, difénoconazole, diflubenzuron, imazaquine, lénacile, oxadiazon, piclorame et pyriproxyfène.

L’application de cette directive modifiant la directive 91/414/CEE devra être faite par tous les pays membres au 1/07/2009.

En savoir plus…
Directive n° 91/414/CEE – réglemente la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques
Directive n° 2008/70/CE – Inscription de la substance active tritosulfuron (CAS 142469-14-5)
Liste des substances actives dans les produits phytopharmaceutiques autorisés par l’UE – Source Wikipedia
Liste des substances interdites dans les produits phytopharmaceutiques autorisés par l’UE – Source Wikipedia

Dr Danièle Henny – Médecin du Travail

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